Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/345

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femme, lui dit-il, puisque tu m’as exposé à la mort, il est juste que tu y sois aussi. En achevant ces mots, il jeta la corde avec le fil de soie & la ficelle dans une petite rivière qui passoit au pied de la tour, & gagna la campagne. Il marcha tout la nuit, & étant arrivé à la pointe du jour dans un village où il n’étoit connu de personne, il y resta en attendant que la fortune lui fût plus favorable.

Pendant qu’il étoit dans cette espérance, & qu’il remercioit le ciel de lui avoir procuré le moyen de se sauver, sa femme, affligée au dernier point, pleura toute la nuit, dans la crainte de la mort qu’elle voyoit inévitable. Le jour étant venu, ses cris & ses plaintes faisant entendre qu’elle demandoit du secours, un homme de qualité qui passoit par là, dit au roi que dans la tour où l’on avoit enfermé l’orfèvre, l’on y avoit mis une femme qui pleuroit continuellement. Le roi, voulant savoir qui elle étoit, ordonna qu’on la lui amenât. Quand elle fut devant lui, elle lui conta la cause de l’accident qui lui étoit arrivé. Ce prince, admirant l’adresse dont l’orfèvre s’étoit servi pour se sauver & pour punir sa femme de son indiscrétion, ne put s’empêcher de rire ; & jugeant que cette subtilité méritoit quelque récompense, ou du moins quelque grace, il fit