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PRÉFACE.

ler son recueil Anthologie, car par leur brièveté elles rappellent les épigrammes antiques. Il semble que les Japonais aient un goût particulier pour ce genre où les Grecs ont excellé. Quelques mots leur suffisent pour éveiller chez le lecteur un sentiment profond. Ce sont les premières mesures d’une mélodie que l’auditeur se plaît à continuer lui-même, et qui l’emporte vers des horizons inconnus. Il y a toutefois cette différence, que les Grecs gravaient pour l’éternité en creusant leurs inscriptions dans le marbre ou le bronze, tandis que les Japonais se contentent de tracer d’un pinceau léger leurs pensées sur un papier parsemé de fleurs de volubilis ou de nénufar. En songeant que cette matière fragile a gardé depuis des siècles la poésie des générations évanouies, on se rappelle involontairement la parole de l’Anglais Hazlitt, défendant les droits de l’écrivain : Après tout, disait-il, la seule chose qui dure ici-bas, ce sont des mots. Hazlitt avait raison ; l’homme ne s’intéresse qu’aux joies et aux douleurs de ceux qui ont passé avant lui