Page:Apollinaire - La Femme assise.djvu/231

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dant de l’artillerie russe, non moins musicien que lui, le comprit si bien qu’à ce terrible concert il mêla les accents aussi sauvages, mais malheureusement moins puissants, de ses canons, complétant ainsi l’horrible symphonie de son ennemi. Ce n’était rien moins que de la musique de chambre. Et ce concert, qui portait la mort, dura ainsi deux jours et deux nuits, terrifiant ceux qui l’écoutaient et auraient bien voulu ne pas l’entendre, mais ne pouvaient s’empêcher d’en admirer l’effrayante et magnifique harmonie.

« Durant la deuxième nuit, le comte Pr… fit lancer sur la ville de G… des obus à gaz suffocant où, s’étant souvenu des alcancies des Mores de Grenade, il avait fait mêler des parfums très subtils qui embaumèrent la ville assiégée et les odeurs les plus variées et les plus violentes s’y succédèrent jusqu’à l’aube, tandis que le front des tranchées s’éclairait d’une merveilleuse pyrotechnie de fusées de toutes les couleurs qui montaient sans cesse et mouraient doucement. La garnison russe