Page:Apollinaire - La Femme assise.djvu/93

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risquant plus, malgré leur insouciance, à venir la rechercher dans le lieu dangereux où elle se tenait volontairement afin de me secourir. Les bataillons arrivaient en courant, rythmant leurs pas et le bruit cadencé que faisaient leurs pieds s’approchait sinistre comme une danse macabre.

L’ange Paméla ne s’en souciait pas et je pensai que j’allais mourir avec elle. Cette fin romanesque m’enthousiasma un moment et je songeai à crier, lorsque les baïonnettes m’atteindraient, un « Vive la République ! » qui, destiné dans ma bouche à glorifier légitimement nos États-Unis, devait paraître (et c’était là une plaisanterie mortuaire que je trouvai excellente) aux soldats qui allaient devenir mes bourreaux, une apologie in extremis du régime populaire contre lequel ils combattaient.

Mais la main qui avait essuyé ma face me prit le poignet et m’entraîna, je distinguai confusément les uniformes des militaires et la silhouette angélique de la femme qui m’entraînait ; elle tenait main-