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Page:Apollinaire - Le Poète assassiné, 1916.djvu/209

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XIV

Rencontres

Six mois passèrent. Depuis cinq mois, Tristouse Ballerinette était devenue la maîtresse de Croniamantal, qu’elle aima passionnément durant huit jours. En échange de cet amour, le lyrique garçon l’avait rendue glorieuse et immortelle à jamais en la célébrant dans des poèmes merveilleux.

« J’étais inconnue, pensait-elle, et voilà qu’il m’a faite illustre entre toutes les vivantes.

« On me tenait pour laide en général avec ma maigreur, ma bouche trop grande, mes vilaines dents, mon visage asymétrique, mon nez de travers. Me voilà belle à cette heure, et tous les hommes me le disent. On se moquait de ma démarche virile et saccadée, de mes coudes pointus qui remuaient dans la marche comme des pattes