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À SA MARRAINE

la pureté de telle ou telle langue ne pèsera pas lourd. Les conventions sont une sorte de pudeur, la passion ignore la pudeur et le poète, l’artiste, sont des gens essentiellement passionnés auxquels il est nécessaire d’oublier la pudeur et les autres conventions qu’ignore la vie ou du moins dont elle ne proclame pas la nécessité.

Vous-même n’avez-vous pas une tendance bien moderne à l’idéogramme, hors même de l’écriture alphabétique, quand vous abrégez vos mots et employez le signe + ? En tous cas, vous sentez ma poésie et je vous suis bien reconnaissant de vous laisser prendre à ce que j’ai ressenti moi-même jusqu’à l’enivrement.

Je lirai donc après la guerre « L’Histoire de la Maison de L’Espine ». Je connais un peu l’éditeur en question, il n’est pas de ceux qui nourrissent leurs auteurs. Les siens se plaignent désespérément et lui-même s’il n’a pas fait ses affaires n’a pas à ce qu’on dit compromis sa fortune tout au moins celle de sa femme. Voilà les on-dit mais la réalité est peut-être tout autre.

Je connais aussi les auteurs dont vous me parlez, sauf M. Abram dont j’ignorais le nom. J’adore que vous soyez paresseuse. Si les femmes souffrent