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LE BON VOLEUR DE GIROPEY

Tous les vols de Charavany furent, comme celui-ci, pittoresques et joyeux. La justice s’en fâchait parfois, quoique plus souvent indulgente ; en somme, il faut bien l’avouer pourtant, notre héros passa aux galères de Toulon la plus grande partie de sa vie.

Charavany était bien vieux quand on l’en sortit, vieux et aveugle. Comment faire ? Il n’y a pas d’invalides pour les voleurs : on envoya donc Charavany à l’hospice de Forcalquier.

À l’hospice, Charavany qui s’ennuyait, Charavany, quoique n’y voyant plus, s’amusa à voler les pauvres. Les pauvres pétitionnèrent en masse, et Charavany fut renvoyé.

Aux hospices de Sisteron et de Digne, mêmes histoires ! si bien que, repoussé de partout, le bon vieux Charavany finit par retomber sur les bras du gouvernement.

Alors, chose invraisemblable, et que cependant chacun vous affirmera dans le pays, alors, le préfet se décida à demander pour lui un petit secours annuel sur je ne sais quels fonds départementaux.

Le secours fut voté par le Conseil général.

Charavany, chargé de gloire et d’ans, vint mourir aux lieux qui l’avaient vu naître, paisible, accueilli de tous, commettant encore de temps à autre quelques menus vols dont on riait, aimé des anciens qui se trouvaient fiers d’un tel contemporain, ainsi que des enfants à qui il contait ses aventures, le soir, sur le banc de l’auberge, aux rayons du soleil couchant. Et si parfois un voyageur demandait