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CONTES DE PROVENCE

« Si les pluies arrivent à temps, et que la semence se trouve bonne, la France, cette année, ne manquera pas de haricots. »

Car Pertuis a cette prétention, quasi justifiée d’ailleurs, de fournir de haricots la France entière. Pertuis aurait pu, grâce à son sol et à son climat, cultiver la garance comme Avignon ou le charbon à foulon comme Saint-Remy ; Pertuis aurait pu dorer ses champs de froment comme Arles, ou les ensanglanter de tomates comme Antibes ; mais Pertuis a préféré le haricot, légume modeste, qui ne manque pourtant ni de grâce ni de coquetterie quand ses fines vrilles grimpantes et son feuillage découpé tremblent à la brise.

De tous ces semeurs semant comme des enragés, le plus enragé, sans contredit, était le brave Pitalugue. La guêtre aux mollets, reins sanglés, il s’escrimait de la pioche, tête baissée. Lorsque dans le terrain passé et repassé