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FRIQUETTES ET FRIQUETS

son pessimiste dans mon cerveau, je songeais aux générations que nous prépare le temps présent, et je désespérais du salut de la France !

Le hasard propice se chargea de me réconforter.

Autour de l’Odéon, dont il parcourut longtemps les hospitalières galeries, bien que les vitrines de libraires fussent depuis midi barricadées de volets, je rencontrai, ô joie ! un potache, mais un vrai potache, le potache des anciens jours. Souliers trop grands, pantalon trop court, la tunique flasque sur la poitrine comme il convient à une tunique qui cumule les fonctions de vêtement protecteur avec celle d’armoire à livres, le képi simplement posé sur une forêt de cheveux vivace et vierge, il s’en allait tranquille au milieu de l’orgie, rêvant à des choses évidemment éternelles, avec l’air doux et ahuri du poète qui cherche un vers.

Ce potache regardait les femmes, mais sans admiration ni dédain, en connaisseur désintéressé, uniquement épris de la beauté pure.

Il s’arrêta un moment pour contempler à