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LES NONPAREILLES DE LA MARQUISE

rendirent plus désirables en voilant, ne fût-ce que, comme Ève et Lilith, d’une feuille verte cueillie sur l’arbre, le mystère de leur beauté.

Ce voile primordial ne resta pas longtemps à devenir parure ; et Lilith un matin tentée agrémenta innocemment sa feuille verte de quelques fleurs.

Dès lors on ne s’arrêta plus.

Dans leur frénésie d’être belles, aussi belles qu’elles se rêvent, plus belles que Dieu ne le fit, les femmes décrétèrent qu’à l’avenir les éléments et leurs secrètes alchimies ne travailleraient que pour elles.

Et pour elles, pendant des siècles et des siècles, l’or vierge, avant de se transformer en bijoux, dut mûrir au creux des caverne que connaissent seuls les dieux cabires ; la perle sous la grotte où dorment les sirènes aggloméra sa dure nacre teinte du reflet des flot clairs ; le lapis refléta le ciel ; le diamant emprisonna la vive clarté des étoiles ; la topaze fut jaune, l’émeraude verte ; le rubis s’ensanglanta aux braises des feux souterrains ; et l’opale qui parfois meurt emprunta la douce pâleur des légères peaux féminines.