Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/144

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le gazon court des buttes, et le cœur se gonflant de vagues ambitions, à regarder des hauteurs où se dresse le Moulin de la Galette, les soleils couchants inonder Paris d’une averse de pourpre et d’or.

Spirituelle, elle l’était ; oui, spirituelle et même, sur certains points, érudite, ayant aux heures du début beaucoup causé avec des poètes dans des brasseries, et fait souvent à un peintre pauvre et sevré de modèles, l’aumône de lui poser, pour l’amour de l’art, un coin de jambe, un bout d’épaule.

Avec cela, d’exquises ignorances. Elle avait peur de la campagne, éprouvant à pénétrer dans les bois de Meudon l’impression de religieuse terreur que dut ressentir l’Européen qui le premier viola le mystère d’une forêt vierge. Un jour, en partie de plaisir, s’étant de quinze ou vingt pas égarée, elle appela, nous accourûmes : — « J’ai vu un loup, un loup énorme que j’ai chassé à coup d’ombrelle. — Un vrai loup ? — Oui ! un loup noir et blanc… » Némorine était toute tremblante, et nous rîmes longtemps, entre amis, du loup noir et blanc de Némorine.

Il est inutile, je crois, de vous dire que je l’aimais.

M’aimait-elle ? C’est une autre histoire ! En tous cas, elle eût été fort désolée si j’avais pu croire qu’elle ne m’aimait point. Les ingénues comme Némorine, — je l’ai maintes fois ob-