Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/302

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à Enghien, vous aurez toujours la ressource d’achever votre nuit dans un café, à Saint-Gratien, où il y a fête. »

Les hôteliers d’Enghien se montrèrent, comme ceux de Montmorency, sourds à nos prières et même aux furieux coups dont, avec nos talons boueux, nous stigmatisâmes leurs portes inhospitalières. Mais après trois quarts d’heure de marches et de contremarches au bord d’un lac vaguement entrevu et qui, dans l’ombre, semblait immense, nous entendîmes les musiques et nous aperçûmes les lampions d’un groupe de baraques foraines. L’ivrogne avait prophétisé !

Le café chantant chantait encore : — « Entrons toujours au café chantant ! »

Ô surprise, ô bonheur, doux regard du phare entrevu, amical accueil du port retrouvé nous connaissions le pianiste ! un musicien de grand talent et de taille minuscule qui, pour avoir le droit d’écrire en toute liberté de formidables symphonies, occupait fructueusement ses loisirs à tenir, moyennant un cachet de cent sous par jour, le piano d’une compagnie de chanteurs courant les foires. Lié par son traité, mieux que cela : esclave de son devoir, il était venu exercer sa fonction de pianiste à Saint-Gratien. Mais comme il se voilait de ses longs cheveux ! comme il se faisait petit, petit ! comme il arrondissait le dos, et comme il plongeait, croyant y disparaître, sur le clavier où ses doigts ner-