Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/88

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ces qualifications, et n’en persista pas moins à exiger du sucre, du café et du thé.

L’Américain, poussé alors jusqu’au dernier terme de l’exaspération, s’adressant à moi, qui servais d’interprète : « Oh ! coquin de renégat ! s’écria-t-il, si jamais je te rencontre en terre sainte, je ferai sauter ta tête en éclats. — Croyez-vous donc, lui répondis-je, que je sois ici pour mon plaisir, et que, malgré votre menace, je ne m’en irais pas avec vous, si je le pouvais ? » Ces paroles le calmèrent ; il apporta le sucre, le café et le thé réclamés par le chef maure, et nous remîmes à la voile, mais sans nous être donné le farewell d’usage.


XXIV.


Nous étions déjà entrés dans le golfe de Lyon, et nous approchions de Marseille, lorsque, le 16 août 1808 nous rencontrâmes un corsaire espagnol de Palamos, armé à la proue de deux canons de 24. Nous fîmes force de voiles ; nous espérions lui échapper ; mais un coup de canon, dont le boulet traversa nos voiles, nous apprit qu’il marchait beaucoup mieux que nous.

Nous obéîmes à une injonction ainsi formulée, et attendîmes la chaloupe du corsaire. Le capitaine déclara qu’il nous faisait prisonniers, quoique l’Espagne fût en paix avec les Barbaresques, sous le prétexte que nous violions le blocus qu’on venait de mettre sur toutes les côtes de France ; il ajouta qu’il allait nous mener à Rosas, et que là les autorités décideraient de notre sort.

J’étais dans la chambre du bâtiment ; j’eus la curiosité