Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 12.djvu/715

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mêmes et au pays, et malheureusement il n’y en a pas beaucoup qui se trouvent dans cette catégorie.

En tous cas, je n’admets pas que les études scientifiques faussent l’esprit, qu’elles dessèchent le cœur et énervent les ressorts de l’âme. Je n’aurais qu’à citer les noms propres pour faire tomber ces reproches et en prouver la fausseté. Pascal, quelle a été sa vie ? Comment a-t-il été élevé ? Dans une académie des sciences, dans la compagnie de Mercenne Roberval, de Carcavi, etc., qui ne lui parlaient que de sciences.

On me dira que c’est une exception. Je citerai Descartes. Il n’est personne qui ait rendu plus de services à la langue française que Descartes, et dont le style soit plus net, plus serré ; pourtant, il a passé toute sa vie dans des occupations scientifiques. Et Buffon ! direz-vous que son style a été énervé, que son imagination a été flétrie par les nombreuses expériences dont la science lui est redevable ?

Si je passe à l’étranger, Haller, Galilée, dont les écrits font la gloire de leur pays, ne se sont-ils pas formés dans les recherches scientifiques ?

J’ajoute une autre citation moins connue. Il y a dans notre littérature un homme dont la supériorité est incontestable, et qui plus est, incontestée : c’est Molière. Molière a très-peu étudié dans les livres ; mais pendant le très-petit nombre d’années, qu’il a essayé, à l’étude, c’est par les études scientifiques qu’il a essayé de développer son esprit ; c’est sous la direction de Gassendi ; et telle était l’influence de ses études que son premier ouvrage est la traduction de Lucrèce, c’est-à-dire la tra-