Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/217

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pu s’établir librement. Une censure inquisitoriale, le pillage des imprimeries, la violation du secret des lettres, devaient être considérés comme ayant présenté des obstacles insurmontables à la manifestation du sentiment populaire. La nouvelle Constitution, ajoutait Condorcet, ne parlant pas de l’indemnité des députés, donne à penser qu’on désire toujours composer la représentation nationale de riches, ou de ceux qui ont d’heureuses dispositions pour le devenir. Les élections trop morcelées sont une prime à l’intrigue et à la médiocrité. C’est calomnier le peuple que de le croire incapable de faire de bonnes élections immédiates. Composer le pouvoir exécutif de vingt-quatre personnes, c’est vouloir jeter toutes les affaires dans une incurable stagnation. Une Constitution qui ne donne pas de garanties à la liberté civile est radicalement défectueuse. Il y a dans quelques dispositions un premier pas vers le fédéralisme, vers la rupture de Funité française. Le plus grand défaut, cependant, c’est qu’on a rendu les moyens de réforme illusoires. »

Une critique si vive, si détaillée, si juste, surtout, ne pouvait être bien accueillie des auteurs du projet. Voici cependant ce qui les irrita le plus, car l’amour-propre est toujours le côté faible de notre espèce, même chez ceux qui s’appellent des hommes d’État :

« Tout ce qui est bon dans le second projet, disait Condorcet, est copié du premier. On n’a fait que pervertir et corrompre ce qu’on a voulu corriger. »

Chabot dénonça la lettre de Condorcet à la Convention, dans la séance du 8 juillet 1793. L’ex-capucin appelait la nouvelle Constitution d’Hérault de Séchelles une