Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/402

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des Nantais, notre confrère s’empressa de donner suite au projet, formé peu de temps auparavant, de s’éloigner des départements insurgés.

Jusqu’au commencement de juillet 1793, Melun avait joui d’une tranquillité parfaite. Bailly le savait par M. de Laplace, qui, retiré alors dans ce chef-lieu de département, y composait l’immortel ouvrage où les merveilles des cieux sont étudiées avec tant de profondeur et de génie. Il savait aussi que le grand géomètre, espérant être encore plus recueilli dans une petite habitation située sur le bord de la Seine et hors de la ville, allait laisser disponible sa maison de Melun. On devine combien Bailly dut être séduit par la perspective de vivre loin des agitations politiques et à côté d’un illustre ami !

Les dispositions furent promptement arrêtées, et, le 6 juillet, M. et Mme Bailly quittaient Nantes, en compagnie de M. et Mme Villenave, qui se rendaient à Rennes.

À cette même époque, une division de l’armée révolutionnaire était en marche pour Melun. Dès que la terrible nouvelle fut connue, madame Laplace s’empressa d’écrire à Bailly pour l’engager, en termes couverts, à renoncer au projet convenu. La maison, lui disait-elle, est sur le bord de l’eau ; il règne dans toutes les pièces une humidité extrême : madame Bailly y mourrait. Une lettre si différente de celles qui l’avaient précédée ne pouvait manquer de produire son effet : tel était, du moins, l’espoir dont M. et Mme de Laplace se berçaient, lorsque, vers la fin de juillet, ils aperçurent avec une frayeur inexprimable Bailly qui traversait l’allée de leur jardin. Grand Dieu !, vous n’avez pas compris la dernière lettre,