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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/677

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confrère jusqu’à leur dernière demeure, montra avec une entière évidence que les déchirements politiques dont la France a été le théâtre pendant plus d’un demi-siècle, y ont laissé heureusement intact le culte du génie.



POISSON CONSIDÉRÉ COMME HOMME PUBLIC.


Si j’en croyais certains esprits craintifs, méticuleux, j’arrêterais ici le tableau de la vie de Poisson. À quoi bon, s’écrient-ils, raconter la très-petite part que notre confrère a prise aux événements prodigieux qui se sont accomplis en France pendant la durée de sa vie ? La postérité s’attachera à enregistrer les découvertes dont il a enrichi la physique mathématique et les théories astronomiques ; elle ne prendra nul souci de ses opinions touchant les révolutions contemporaines, de ses répugnances, de ses sympathies.

Ces considérations, toutes spécieuses qu’elles puissent paraître, ne m’ont pas détourné de mon but ; les hommes d’élite doivent être envisagés sous tous les aspects possibles ; il importe à l’histoire de l’intelligence humaine de constater si, comme tant de gens le supposent, le même individu peut être un homme de génie sur un objet spécial et un homme ordinaire sur tous les autres objets.

C’est aussi une recherche très-digne d’intérêt que celle de savoir si les sciences ont le triste privilége de rendre ceux qui les cultivent avec distinction, étrangers aux sentiments qui font le bonheur des autres hommes et indifférents aux révolutions opérées dans l’ordre politique et dans l’ordre moral, à ces changements qui exercent tant