Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/566

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pas le jeune poëte : il préféra rester un homme de génie !

Molière consacra toujours à des aumônes, à des libéralités une large partie de ses revenus ; aussi était-il adoré des malheureux et de ses camarades.

Il fit plus (notre fragilité justifiera ces trois mots), il fit plus, car il rechercha avec empressement les jeunes gens dont le talent commençait a poindre les jeunes auteurs qui pouvaient un jour devenir ses rivaux.

Témoin Racine, dont Molière devint le protecteur, et, on doit l’avouer, à une époque où il fallait être Molière pour apercevoir l’immortel auteur de Britannicus, de Phèdre, d’Athalie, dans les premiers essais d’un versificateur encore inexpérimenté.

Lorsque Colbert envoya cent louis à Racine, au nom de Louis XIV, pour le remercier de l’ode si connue sur le mariage du monarque, le public remarqua malicieusement que la générosité du fastueux souverain d’un grand royaume n’avait pas surpassé celle que le simple comédien venait d’exercer en faveur du jeune poëte.

Molière, dans toutes les circonstances de sa vie, montra pour le vice cette haine vigoureuse, si bien dépeinte dans le Misanthrope, et qui a fait supposer qu’il s’était transporté lui-même sur la scène.

Molière, sorti du peuple ambitionnait par-dessus tout ses suffrages. En butte à mille passions haineuses, il eut besoin d’un appui solide, et pour le conquérir il composa plusieurs pièces dans le goût de celles que la multitude applaudissait au théâtre de Scaramouche. Mais qu’on y regarde de près, ces ouvrages secondaires, que des juges inattentifs qualifient d’une manière sévère et en termes