Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/627

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mente pendant sa vie, pour qu’on parte de lui lorsqu’il n’y sera plus ? » Eh bien ! les faits incontestés, éclatants, viendront à mon aide :

D’Alembert ne remplit jamais de fonctions ni dans le professorat ni dans l’administration ; aucune obligation quotidienne ne lui fut imposée durant sa vie ; cependant, dans la seule branche des mathématiques, il a publié en ouvrages spéciaux et en mémoires séparés, l’équivalent de plus de dix volumes in-4o, dans lesquels la postérité remarquera la découverte d’un principe général de dynamique ; la découverte du calcul aux différences partielles ; le perfectionnement de l’explication des plus importants phénomènes des mouvements célestes, la précession des équinoxes, et la nutation de l’axe de la Terre.

Euler, dont Condorcet a caractérisé la carrière d’une manière si vraie et si concise en disant que le 7 septembre 1780, à l’âge de soixante-seize ans, « il cessa de calculer et de vivre ; » Euler, pensionné, mais non astreint à aucune occupation quotidienne, avait écrit plus de trente ouvrages séparés, et près de sept cents Mémoires. Les prescriptions de l’autorité, les engagements d’honneur, pourraient à toute rigueur donner naissance à un travail si colossal ; mais le seul génie, abandonné à lui-même, débarrassé de toute entrave, produisant, parce qu’il est dans sa nature de produire, pouvait allier l’originalité au nombre, marquer chaque écrit par des vues ingénieuses, de nouvelles méthodes ou par des découvertes du premier ordre.

J’ai honte, enfin, d’aborder la supposition qu’il n’existe chez l’homme, d’activité d’esprit, de passion pour la