Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/282

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peser sur lui seul cette immense responsabilité, à tirer de cette affaire une question de couleur ? Il n’appartenait qu’à Sonthonax, si souvent inconséquent, de commettre une telle injustice.

Nous venons de citer ce que dit Rigaud pour la défense de Pinchinat. Rigaud avait assisté à la délibération du comité secret tenu à cette occasion ; il semble donc qu’il a connu l’opinion, le vote émis par Pinchinat ; il semblerait même convenir que lui aussi, il consentit à cette mesure, tandis qu’il ne parle ainsi qu’en prenant la défense de tous les hommes de couleur ; car son Mémoire n’a été publié que dans le but de réfuter les calomnies dont ils étaient l’objet de la part de Sonthonax et de ses agens. Lorsqu’il le publia, Pinchinat, envoyé en France, avait été fait prisonnier par les Anglais. À son arrivée en France, il eut connaissance de la proclamation de Sonthonax où ce dernier l’avait accusé. Il publia un écrit où il se défend lui-même de cette imputation. Il y convient que ce fut un acte liberticide, un crime, une atrocité, en disant qu’il n’en fut pas l’auteur. Il termina ce plaidoyer par ce qui suit :

« Ceux qui ne connaissent pas bien Sonthonax s’imagineront peut-être qu’il se propose de faire valoir contre moi un tel chef d’accusation. Point du tout : son intention est bien de me noircir et de me diffamer en France auprès des amis de la liberté ; mais son principal but n’a été que de me rendre odieux aux noirs, par cette proclamation publiée et répandue dans toutes les parties de Saint-Domingue. Cependant, il a beau faire, ses efforts seront inutiles. Les noirs, quoiqu’on les suppose peu éclairés, le sont néanmoins assez pour reconnaître leurs vrais amis, leurs vrais