Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 11.djvu/148

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M. le duc de Broglie, avait fait son important rapport au gouvernement sur cette question, en concluant en faveur de l’abolition de l’esclavage. M. G. de Cassagnac ne s’était pas borné à applaudir à l’asservissement des noirs, aux préjugés ridicules qu’il fait naître contre leurs descendans ; il s’était plu à proclamer sa haine contre les Haïtiens : son voyage dans la République ne fut envisagé par ceux dont nous parlons que comme un défi qu’il leur jetait, sous les auspices du pavillon français, et qui méritait d’être relevé de cette manière. Il dînait à l’hôtel, en compagnie de plusieurs officiers d’un navire de guerre anglais qui était dans la rade[1], à côté de la Perle, quand le charivari se fit entendre ; ayant su que son nom était prononcé, que cette farce était à son adresse, il parut effrayé, a-t-on dit alors, au point de réclamer la protection dé ces officiers ou leur concours pour sortir de ce pas. Enfin il fit prévenir M. Levasseur, son consul, qui envoya auprès de lui le chancelier du consulat avec lequel il s’y rendit pour y passer la nuit ; il jugea prudent de se rembarquer sur la Perle, dès le lendemain matin.

Malheureusement, quelques gamins étaient accourus au bruit du charivari, et ils avaient envoyé des pierres sur le balcon de l’hôtel ; ce qui mit fin à cette sérénade d’une nouvelle espèce. En cette circonstance, plus risible que sérieuse, M. Levasseur crut l’honneur français intéressé à la punition de ceux qu’il appelait « les coupables auteurs d’une tentative d’assassinat sur la personne de M. G. de Cassagnac, » bien que l’autorité militaire, avisée du fait, eût envoyé de suite une garde pour le protéger et dissiper l’attroupement formé devant l’hôtel de la marine. Nous

  1. Lebrig le Victor, capitaine Dawson, arrivé de la Barbade le 16 avril.