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Léogane. Cette lettre, écrite par Desfontaines, devait leur procurer l’accès de la maison d’Inginac, qu’ils réveilleraient dans la nuit sous prétexte de service public très-pressé et de la part du colonel Lamarre : ce qui porterait le général à ouvrir sa porte et ce qui faciliterait son assassinat.

En effet, le 2 mai, à 2 heures du matin, les quatre assassins se transportèrent à Monrepos. Raymond frappa à la porte en disant : qu’il était porteur d’une lettre du colonel Lamarre. Le général Inginac se leva et vint lui-même pour la recevoir. Raymond la lui remit. Pendant que Madame Inginac approchait une bougie allumée pour que son mari pût la lire, Raymond déchargea un pistolet à bout portant à la tête du général. La balle l’atteignit derrière l’oreille et sortit par la bouche ; il n’était heureusement que blessé gravement et fut renversé. Raymond et ses complices prirent la fuite, le croyant mort du coup. On peut juger de l’effroi, de la douleur que ressentit Madame Inginac en ce moment ; mais reprenant son courage dont elle donna tant de preuves, elle envoya appeler aussitôt le docteur Smith, son gendre, qui était en ville, pour panser la blessure ; et par les soins habiles du docteur, le général Inginac fut bientôt guéri. Elle fit aussi donner avis de ce crime au colonel Victor Poil, commandant la place, sans pouvoir désigner l’assassin. Cet officier se rendit immédiatement à Monrepos, accompagné, d’une garde. Le Président y alla dans la matinée, ainsi qu’une foule d’amis du général Inginac, tous sympathisant à son sort ; le 5, il fut porté en ville[1].

Il n’y avait guère de conjectures à faire sur la cause du

  1. En juillet suivant, le Président promut Inginac au grade de général de division.