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mille nègres au secours du commissaire et des blancs, et que c’est à ce noir que les habitans de la ville durent leur salut ? » D’abord, nous remarquons que la première narration dit que les noirs venus de la plaine, vers huit heures du matin, continuèrent l’égorgement des blancs. Ensuite, où Hyacinthe eût-il pris ces six mille noirs, cette formidable armée ? Etaient-ils campés dans la plaine, pour accourir si promptement en ville ? D’ailleurs, avec le caractère ardent de Sonthonax, lui, commissaire civil, obligé de quitter son palais pour se réfugier dans un fort, ayant encore autour de lui Desfourneaux et le 48e régiment, il eût négligé ce secours de six mille noirs contre Montbrun et la légion ! Il n’en eût pas profité pour soumettre celui-ci à discrétion ! Il aurait préféré se soumettre aux dures conditions du commandant de la province de l’Ouest ! N’avait-il pas appelé les noirs contre Galbaud ?…

Le sens commun repousse une telle assertion de la part de Malenfant[1].

Il ne repousse pas moins cette autre où il avance que Pétion, commandant une compagnie de mulâtres canonniers réunis aux marins blancs et à la troupe de Desfourneaux, se joignit à celui-ci pour solliciter Sonthonax de marcher contre Montbrun. Pétion eût abandonné Montbrun, pour soutenir les flibustiers de Praloto et les soldats d’Artois qu’il avait foudroyés de son artillerie le 21 novembre 1791 ! Où donc Malenfant a-t-il rêvé ce fait absurde ? Avant la fin de 1794, nous verrons Pétion, à Jacmel, prendre parti pour Montbrun dans sa querelle avec Bauvais. Nous remarquons que le premier narrateur

  1. Malenfant, colon du Cul-de-Sac, était l’un de ceux que Sonthonax favorisait alors.