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des assemblées coloniales : ces lettres offraient des sommes considérables aux commandans militaires pour livrer leurs places. L’une, de Valentin de Cullion, du 15 mai, était adressée plus particulièrement aux hommes libres du Petit-Goave où commandait le brave Brunache ; il y disait : « Polvérel et Sonthonax n’ont jamais été que les agens d’une faction qui a trompé les blancs, les hommes de couleur et les nègres. Cette faction coupable dont ils servaient les desseins, est enfin démasquée, et tous les chefs ont été exterminés dans la métropole. Brissot, Grégoire, Roland, Condorcet, etc., ont expié leurs crimes ; ils ne sont plus. La convention n’a pas épargné leurs complices dans cette malheureuse colonie : Polvérel et Sonthonax sont condamnés à mort… »

Il faut convenir qu’il fallait une foi bien ferme, aux hommes de couleur qui dirigeaient leur classe, pour résister à tant de moyens de captation. Quelles Anglais et les colons tinssent un tel langage, c’était dans l’intérêt de leur cause antisociale ; mais que penser de cette convention nationale qui avait fait mourir les plus zélés défenseurs des noirs et des hommes de couleur, et qui avait décrété d’accusation Polvérel et Sonthonax, leurs défenseurs à Saint-Domingue, parce que les Girondins les y avaient envoyés ? N’était-ce pas assez pour ébranler la fidélité du plus grand nombre des hommes de ces deux classes ? Ajoutez à ces considérations déjà puissantes, les fautes personnelles à Sonthonax, ses préventions injustes, sa rancune concentrée depuis l’affaire du 18 mars, et l’on aura la clé de ce qui va survenir.

Ces choses se passaient à la fin de mai 1794 ; et l’on ignorait dans cette ville les faits importans et décisifs qui venaient de s’accomplir dans le Nord et dans une partie