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sonne, consentit à céder ces deux places, et partit brusquement, emportant dans son cœur, et laissant dans celui du général en chef, de nouveaux fermens de haine qui ne tardèrent pas à se développer. »

Qui donc était cause de toutes ces haines ? Au lieu d’en accuser T. Louverture tout seul, Kerverseau ne devait-il pas reconnaître que le Directoire exécutif, que ses agens, y poussaient aussi ces généraux ? Mais, il ne pouvait pas le dire au ministre de la marine à qui il relatait les faits. Est-ce que la décision rendue par Roume prouve qu’il voulait étouffer tous les ressentimens ? Il les augmentait, au contraire, et à dessein : comme le gouvernement qu’il représentait, il voulait voir éclater la guerre civile entre T. Louverture et Rigaud, pour arriver à l’affaiblissement de ces hommes dont on méconnaissait les services. Le seul moyen d’empêcher cette guerre était d’accepter la démission de Rigaud qui, déjà nommé député au corps législatif depuis près d’un an, eût eu alors un motif honorable pour quitter Saint-Domingue. On va voir comment Roume agit à son égard.

En effet, le lendemain de cette conférence, où la partialité de cet agent s’était montrée de manière à courroucer Rigaud, le 6 février, ce général lui adressa une lettre accompagnant un aperçu sur la situation du département du Sud, qu’il avait soumis à Hédouville. Cet aperçu contenait un précis de tous les événemens qui s’y étaient passés depuis le départ de Polvérel et Sonthonax ; l’état de la force armée, des notes sur son organisation, sur l’organisation civile et judiciaire, et était accompagné d’une carte particulière du Sud.

« J’ai cru, dit-il à Roume, que ces détails vous seraient nécessaires pour le changement que vous aurez à faire.