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la France. Sonthonax était complètement revenu sur ses préventions contre Rigaud : la conduite de ce général et celle de T. Louverture l’avaient éclairé[1].

À la même époque, suivant M. Saint-Rémy[2], Pinchinat et d’autres personnes proposèrent leurs avis pour la cessation de la guerre civile du Sud. Pinchinat défendit Rigaud et proposa de le rappeler en France, en envoyant dans le Sud un général français, et un autre comme gouverneur général à la résidence du Port-au-Prince : dans ce plan, T. Louverture eût continué de commander le Nord. Mais le colonel Vincent prit la défense de ce dernier, et son avis prévalut : il était sans doute plus initié que Pinchinat et Sonthonax dans la politique du gouvernement consulaire[3].

Quoi qu’il en soit, après avoir vu les trois agens, T. Louverture se rendit au Petit-Goave où, le 20 juin, il émit une proclamation adressée à tous les citoyens du Sud : c’est la plus modérée qu’il ait faite à leur égard ; elle commençait ainsi :

« L’humanité et la sensibilité qui ont toujours été la base de ma conduite et de toutes mes actions, m’obligent de vous prévenir encore des malheurs qui vous menacent… J’ai reçu des ordres du gouvernement français qui me prescrivent de rétablir la paix et la tranquillité dans cette malheureuse colonie, de faire cesser la guerre intestine

  1. Au 18 brumaire, Sonthonax, député au conseil des Cinq-Cents, fut incarcéré à la Conciergerie : il en sortit quelques jours après. (Moniteur du 8 frimaire.) C’est peut-être cette circonstance qui fît dédaigner son avis. Du reste, il avait si bien traqué Rigaud à Saint-Domingue, qu’on ne pouvait plus l’écouter.
  2. Vie de T. Louverture, p. 291 et 292.
  3. Suivant Montholon : « Le Premier Consul appela Vincent, lui fit connaître sa partialité pour les noirs, sa confiance entière dans le caractère de T. Louverture, et le renvoya dans la colonie. Tome 1, p 186. »