Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 4.djvu/205

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« Il sortit des Cayes, accompagné de ses parens et d’un nombreux cortège d’amis, au milieu de toutes sortes de témoignages d’intérêt ; le peuple, respectant son malheur, le couvrait de bénédictions. Chacun versait des larmes et gémissait qu’il eût été trahi par la fortune ; mais chacun sentait profondément que la résistance était devenue impossible. Il fit de touchans adieux à la foule, et prit la route de Tiburon[1]. »

Que deviennent alors toutes les accusations contre Rigaud, transcrites par le même auteur, dans les pages 39, 40, 61, du même volume, que nous indiquons seulement à nos lecteurs nationaux[2] ? Est-ce qu’un chef qui se serait ainsi conduit dans sa lutte contre T. Louverture, aurait obtenu à son départ, à sa fuite, de tels témoignages de regrets et de sympathies de la part de toute la population, — les blancs exceptés ? Et encore, il y eut parmi eux des hommes qui se joignirent à ceux de la race noire, pour exprimer de semblables sentimens à Rigaud : c’étaient les vrais amis de la France, qui comprenaient ses intérêts dans la colonie, autrement que la généralité des colons.

Rigaud s’embarqua à Tiburon, avec sa famille, le 29 juillet, sur un navire danois qui les porta à Saint-Thomas. Après son départ, une lettre de T. Louverture, à son adresse, arriva à Tiburon : nous ignorons quel en était le but[3].

  1. Histoire d’Haïti, t. 2, p. 59.
  2. À la page 39, M. Madiou fait une citation sans désigner le nom de l’auteur des diatribes qu’elle renferme contre Rigaud. Nous craignons qu’il se soit laissé trop aller à une confiance aveugle en l’auteur anonyme, et aux traditions orales qui l’ont égaré si souvent dans son ouvrage.
  3. M. Madiou s’est trompé sur de faux renseignemens, en disant que Dessalines poursuivit Rigaud à Tiburon : il n’y eut que cette lettre portée par un officier.