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comme il la palliait lui-même dans ses rapports officiels. » Un tel aveu doit donc faire supposer que la perte réelle était supérieure au chiffre de 1500 hommes[1].

Lorsqu’un millier de braves avaient ainsi résisté à plus de douze mille homme aguerris, pourvus de toutes les connaissances militaires, de tous les moyens de destruction que donne la guerre, ils pouvaient considérer qu’ils avaient assez fait pour leur gloire ; mais pas un ne songea à capituler !

En quittant la Crête-à-Pierrot, Dessalines avait prévu qu’il lui serait peut-être impossible de secourir efficacement la garnison, contre toute l’armée française concentrée sur ce point. Dans cette pensée, il fit remarquer à Magny et à Lamartinière un anneau qu’il portait au doigt, comme devant être le signe de l’ordre d’évacuation qu’il pourrait leur envoyer. En effet, dans la nuit du 23 mars, un vieil officier noir et une vieille femme de la même couleur avaient réussi à tromper la vigilance des assiégeans, en pénétrant dans le fort : l’officier exhiba l’anneau de Dessalines aux deux chefs qui le défendaient, et qui se préparèrent dès ce moment à l’évacuation qu’ils ne pouvaient effectuer que dans la nuit suivante.

Au jour, les deux émissaires sortirent du fort et furent aperçus par un officier d’état-major du nom d’Hédouville, qui était déjà venu dans la colonie avec l’ancien agent : il les fit arrêter et les questionna. Résolus à subir tout, même la mort, plutôt que d’avouer l’objet de leur mission, ils nièrent d’être sortis du fort : on les assomma à coups

  1. Nous avons lu sur le Moniteur un rapport de Leclerc au ministre de la marine, où il avoue le chiffre de 500 hommes ; mais, par contre, il y dit que les indigènes perdirent plus de 3000 hommes. Voilà comme on trompe les gouvernemens !