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d’une grande politesse, et qui se ressentaient néanmoins du despotisme de son caractère, faisaient du Cap une ville de jouissances continuelles pour les blancs avec lesquels il vivait dans la plus étroite familiarité.

Cependant, à la vue de ces nombreux vaisseaux qui parurent devant le Cap, des pavillons français et espagnol qu’ils arboraient, Christophe comprit qu’ils recelaient dans leurs flancs une armée qui ne pouvait venir à Saint-Domingue, qu’en vue de renverser le pouvoir de T. Louverture à qui il était dévoué, et avec lui les principaux chefs qui l’aidaient dans l’administration de la colonie. Sans ordre précis du gouverneur général pour cette éventualité, il se rappela néanmoins qu’une ancienne disposition de la commission civile, depuis Sonthonax et renouvelée ensuite, défendait aux officiers supérieurs de laisser entrer dans les ports des forces maritimes considérables, sans qu’au préalable ou eût reconnu leur nationalité et leur objet.[1] On a vu qu’à l’arrivée, au Cap, des frégates venues avec Hédouville, il avait fallu une autorisation spéciale de J. Raymond pour les faire admettre par le général B. Léveillé, alors commandant de l’arrondissement.

Christophe s’était donc porté au fort Picolet qui défend principalement l’entrée du port, pour faire tirer sur les vaisseaux s’ils essayaient d’y pénétrer, tandis que les habitans et la municipalité, dirigés par César Thélémaque, ne soupiraient qu’après le débarquement des troupes, se fondant surtout sur la proclamation de T. Louverture. Voilà la vérité.

Un bâtiment léger s’étant approché, Christophe or-

  1. Mémoire de T. Louverture au Premier Consul.