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officier, pour avoir préservé les jours des blancs contre la fureur des partisans de Rigaud. Mais en même temps, Leclerc déclara à la députation qu’il ne pouvait différer le débarquement de ses troupes, parce qu’il y avait lieu de craindre que Christophe ne voulût employer le temps qu’il réclamait, à organiser une défense militaire ; qu’en conséquence, le débarquement s’opérerait une demi-heure après le retour de la députation. Il comptait sans le vent qui restait contraire aux vaisseaux. Il envoya avec la députation un aide de camp porteur de la lettre suivante à Christophe.


À bord de l’Océan, le 14 pluviôse an X (3 février).

J’apprends avec indignation, citoyen général, que vous refusez de recevoir l’escadre et l’armée française que je commande, sous le prétexte que vous n’avez pas d’ordre du gouverneur général.

La France a fait la paix avec l’Angleterre, et le gouvernement envoie à Saint-Domingue des forces capables de soumettre des rebelles, si toutefois on devait en trouver à Saint-Domingue.

Quant à vous, citoyen général, je vous avoue qu’il m’en coûterait de vous compter parmi les rebelles. Je vous préviens que si, aujourd’hui, vous ne m’avez pas fait remettre les forts Picolet, Belair et toutes les batteries de la côte, demain à la pointe du jour quinze mille hommes seront débarqués. Quatre mille débarquent en ce moment au Fort-Liberté, huit mille au Port-au-Prince. Vous trouverez ci-joint ma proclamation ; elle exprime les intentions du gouvernement français. Mais rappelez-vous que, quelque estime particulière que votre conduite dans la colonie m’ait inspirée, je vous rends responsable de tout ce qui arrivera.

Le capitaine-général, etc. Leclerc.

Ce langage de la force était calculé pour intimider Christophe. Mais en faisant un si grand étalage de ses troupes, le capitaine-général oublia de mentionner celles qui étaient sous les ordres de Kerverseau et de supposer une autre division navale agissant aussi contre le Sud.