Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/349

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personne au Fort-Liberté pour en demander à Toussaint Brave, qui l’accueillit et lui en donna un millier de livres. Ces difficultés incessantes et toujours à prévoir avec Sans-Souci, Petit-Noël et les autres chefs de Congos, le décidèrent à quitter le Nord pour se réunir à Dessalines. Néanmoins, afin de témoigner d’une manière toute particulière à Petit-Noël, sa satisfaction personnelle de ce qu’il avait cédé à ses avis, à D’Héricourt, il lui fit cadeau de l’obusier et des deux pièces de 4 qu’il avait pris au Haut-du-Cap dans la nuit du 13 octobre. Ce don lui concilia tous ces hommes que l’ignorance égarait.

Il dut encore user de son esprit conciliant pour arrêter la fureur de ces Congos. Au moment de se séparer de Clervaux et de Christophe, vers la Grande-Rivière, il vit arriver Sans-Souci avec ses nombreuses bandes. Cet homme voulut contraindre ces trois chefs et leurs troupes à le reconnaître pour général en chef. Faire un refus catégorique, c’eût été commencer le combat. Clervaux et Christophe n’étaient pas éloignés de cette résolution ; mais, plus sage et plus adroit qu’eux, Pétion feignit de se soumettre à l’autorité de Sans-Souci, en lui montrant une figure sereine, et ne paraissant pas s’émouvoir nullement de cette ridicule prétention : c’était le seul moyen d’empêcher ce qui eût été un malheur déplorable ; et par là, il sembla stipuler pour ses deux camarades. Dans l’excès de son orgueil et de sa vanité, Sans-Souci, jouant tout de bon le rôle qu’il s’était donné, proclama Pétion général de brigade, croyant le gagner mieux aux intérêts de son ambition, et avec lui tout le corps de la 13e Mais, en même temps, il déclara qu’il voulait la tête de Christophe qui, prétendait-il, était encore dévoué aux Français ; et il ordonna à ses bandes d’envelopper les 1re,