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fronts, soucieux de la situation où l’on s’est engagé. Voilà quel fut, dans l’espace de quatre jours, le singulier sort du Héros des Karatas !

Il avait pris l’initiative de la courageuse résolution qui, en renversant un Empereur et son Empire, devait donner naissance à une République et à un Royaume, et occasionner une guerre civile de quatorze années entre ces deux Etats, et il ne put soutenir son rôle ! C’est qu’il n’est pas donné à tout le monde de remplir celui de révolutionnaire. Pour y réussir et se maintenir, il faut avoir des antécédens honorables, du caractère et de la capacité, sinon l’on est promptement sifflé sur le théâtre où l’on se met en scène.

Toutefois, voyons le côté sérieux et politique de l’entreprise de Messeroux. Il a sauvé, pour son pays, le principe du respect dû à la propriété ; il a donné une leçon à tous les gouvernemens qui y ont succédé à celui de Dessalines. Cet important résultat doit faire tirer de l’oubli le nom de Messeroux, et d’autant plus, qu’en faisant prévaloir ce principe sacré et celui de la résistance à l’oppression, il n’a usé d’aucuns sévices sur la personne du général Moreau ; il n’a commis ni fait commettre aucun crime. Rendons cette justice à sa mémoire ![1]


Quittons les Cayes un moment, pour voir ce qui eut lieu à l’Anse-à-Veau, où se trouvait l’homme destiné à prendre, dans le Sud, la direction de la levée de boucliers de 1806.

Le général de division Gérin, ministre de la guerre et de la marine, avait obtenu de l’empereur l’autorisation de ve-

  1. Messeroux continua ses fonctions de juge de paix, et devint en 1808 assesseur au tribunal d’appel des Cayes. Il avait été et fut toujours un bon citoyen.