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donner cette direction aux 22e et 23e demi-brigades et à la population.

Quoique les troupes du Port-au-Prince fissent la route rapidement, Pétion avait hâte de se rendre au Petit-Goave pour avoir le temps de s’aboucher avec Gérin, qu’il savait être à la tête de celles du Sud[1]. Les colonels Frontis et Apollon, qui commandaient la 11e et la 12e, étaient des hommes dévoués à Dessalines. Pétion ne leur avait pas plus dit qu’à Germain ses desseins secrets ; il attendait sa jonction avec les troupes du Sud pour que l’embauchage se fît par les soldats. Il précéda ces deux corps avec Germain, qu’il laissa au Grand-Goave pour les rallier ; et, après avoir envoyé au Petit-Goave le colonel Dieudonnéet le capitaine Boyer, ses aides de camp, pour y annoncer son approche, il rencontra le général Yayou qui venait au-devant de lui. Ce général lui raconta l’entretien qu’il avait eu, peu d’heures auparavant, le 15 octobre, avec Gérin. Celui-ci avait déjà produit sur son esprit une impression favorable : Pétion acheva son œuvre, en lui disant qu’ils n’avaient tous qu’à prendre la même résolution ; que le règne de Dessalines devait finir, puisque ce chef ne donnait aucune sécurité à la vie de qui que ce soit, et qu’il opprimait la nation. L’ancien lieutenant de Sans-Souci put se rappeler en ce moment tous les antécédens du Nord, en 1802 et 1803 : d’ailleurs, ses relations avec Pétion, depuis qu’il commandait à Léogane, étaient sur le meilleur pied ; elles assuraient sur son esprit cet ascendant, cette influence que Pétion exerçait sur tous.

  1. Il est même présumable que Gérin lui aura écrit, dès qu’il prit la résolution de marcher sur l’Ouest ; mais aucun document, aucune tradition orale ne constatent ce fait.