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buèrent peut-être à engendrer deux mois après, un nouvel acte d’héroïsme et de dévouement militaire, qui sauva la jeune République d’Haïti[1].

Les peuples gagnent toujours à louer les actions qui sont en harmonie avec la sainte loi du devoir.

Si, dans l’intérieur de la ville du Port-au-Prince, l’anxiété publique était grande lorsqu’on apprit la présence de Dessalines à l’Arcahaie ; si elle augmenta, quand circula la nouvelle de son arrivée au Pont-Rouge : en apprenant qu’il avait péri dans l’embuscade, ce fut une joie frénétique, universelle ; citoyens et soldats poussaient des cris d’allégresse dans les rues. L’adjudant-général Bonnet, à la tête de la cavalerie, les parcourut aux cris de : Vive la liberté ! Le tyran n’est plus ! Tous ceux qui l’entendaient applaudirent, en répétant ces cris de triomphe[2].

Les aides de camp de l’ex-empereur entrèrent en ville, plusieurs avec des craintes sur l’issue des événemens, par rapport à eux-mêmes. Il y en avait, en effet, qui étaient autorisés à avoir ces craintes ; mais on ne leur dit rien dans ces premiers jours, de même qu’on n’avait fait aucune tentative contre eux au Pont-Rouge[3]. Cependant, le général Germain Frère fut tué dans la prison où il était détenu, peu d’instans après la mort de Dessalines : son sort était lié avec celui du chef qu’il avait plus d’une fois excité, à la connaissance de tous, à de mauvais actes. Les cultivateurs de la plaine, ceux des montagnes environnantes, les troupes de la garnison habituelle du

  1. Le dévouement de Coutilien Coustard, à la bataille de Sibert, le 1er janvier 1807.
  2. J’ai vu ce que j’écris. Bonnet passa près du magasin de l’Etat où je me trouvais. On délivrait des habillemens aux troupes dès six heures du matin : les soldats abandonnèrent tout pour courir à leurs drapeaux.
  3. Il y en eut qui rebroussèrent chemin et allèrent à Saint-Marc ou ailleurs.