Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/110

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tion de Pétion. Dans sa diatribe, Chanlatte disait, qu’étant trésorier à Jérémie lors de la fuite de Rigaud en 1800, Blanchet, « d’une distraction incurable, » avait embarqué avec lui, « sans y songer, » la caisse de l’Etat ; et qu’arrivé aux États-Unis, il s’était aperçu de cette « transplantation involontaire[1]. » Or, au moment où cet écrit parvint au Port-au-Prince, on se plaignait hautement de la mauvaise gestion des finances par lui qui, comme secrétaire d’Etat, ne pouvait parvenir à faire rendre compte par les administrateurs de cette branche de service public. On a vu que par son message du 19 mai, en forme d’arrêté, le sénat invitait le président, « au nom du salut public et de l’armée, » à donner ses ordres au secrétaire d’Etat pour qu’il fît parvenir au corps législatif, des cadastres, des comptes, etc., qu’il aurait dû fournir déjà au comité des finances. Le président le pressait à cet égard, sans pouvoir rien obtenir de lui ; les sénateurs s’en plaignaient vainement. C’est que, pour tout dire (l’histoire ne devant rien cacher), Blanchet aîné s’abandonnait à la boisson ; dès 9 heures du matin, il déraisonnait. Une telle situation ne pouvait plus être tolérée ; les administrateurs et autres employés des finances se moquaient de leur chef, qui ne pouvait surveiller leur comptabilité et leurs actes ; l’armée, les sénateurs, les employés divers ne recevaient ni solde ni appointemens, et l’armée expéditionnaire dans le Nord avait besoin d’être entretenue par une solde régulière, par des habillemens, des approvisionnemens de guerre et de bouche, afin de remplir sa laborieuse tâche.

  1. Daumec, qui l’ut un des plus maltraités, me dit un jour, qu’à son avis, cette satire de J. Chanlatte était son meilleur écrit, sous le rapport du style : « Mais, que de méchancetés ! ajouta-t-il. »