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Le Président d’Haïti se vit donc forcé d’user de ses pouvoirs extraordinaires, en révoquant Blanchet aîné de son éminente charge[1]. Il nomma César Thélémaque, secrétaire d’Etat : celui-ci avait été contrôleur des finances au Cap, et quoique peu capable, il avait du moins de la dignité, de la fermeté et toute la probité nécessaire pour imposer aux fonctionnaires placés sous ses ordres[2]. Des employés, éminens par leur savoir, lui furent donnés pour l’aider, entre autres A. D, Sabourin qui avait été aussi contrôleur des finances sous l’empire. Afin de reconnaître néanmoins et de récompenser les services de Blanchet aîné dans l’ordre politique, Pétion créa pour lui la haute charge de secrétaire général du gouvernement ; dans ces fonctions nouvelles, il devait concourir, par ses conseils, aux actes de la présidence et les contresigner. Mais Blanchet aîné ne pardonna pas plus sa révocation à Pétion, qu’il n’avait pardonné à Dessalines de l’avoir révoqué comme trésorier à Jérémie ; et ce fut par suite de son mécontentement, qu’il devint, en 1810, la cheville ouvrière de la scission du Sud.


Dans cet intervalle, Lamarre, qui était dans la commune de Jean-Rabel, n’avait pas tardé à reprendre l’offensive contre l’armée de Christophe, afin de favoriser les insurgés des montagnes du Gros-Morne, de Saint-Louis et du Borgne. Le 19 août, il s’était mis en marche contre le Port-de-Paix ; et arrivé près de cette ville, il avait détaché de son armée de 2000 hommes à peine, le colonel Bauvoir à la tête de 1200 de ces braves, pour se

  1. Cette révocation eut lieu en octobre.
  2. C. Thélémaque fit imprimer des titres de lettres, en mettant en tête : « République d’Haïti. — Justice, — Sévérité. » C’était dans le but d’intimider les comptables qui se faisaient tirer l’oreille.