Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/165

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C’est dans les Républiques surtout, qu’aucun homme ne doit se croire indispensable : on y sert l’Etat, et non pas son chef. Vient-on à penser que la direction qu’il imprime à la marche des affaires est compromettante, on doit se retirer pour ne pas concourir avec lui, et se réserver pour l’avenir. Si l’on conserve son emploi, il faut le seconder, loin de lui faire opposition ; car le pays ne pourrait qu’en souffrir.

Dans les monarchies, au contraire, il est à peu près d’usage qu’on s’inféode au monarque qui absorbe la souveraineté nationale, qui a un intérêt dynastique très-souvent en opposition avec l’intérêt général : on sert surtout un individu et sa famille, et il n’y a presque pas d’opposition possible. Que l’on garde donc son emploi, puisque l’on est sujet !

Néanmoins, on voit dans la réponse de Pétion, que s’il fut empressé à accepter la démission de Gérin, parce qu’il pensait sans doute qu’avec son caractère, ce général eût pu produire de mauvais effets dans le département du Sud, il laissait entrevoir à ce camarade d’armes que ses services pourraient être encore utilisés pour la guerre ; il lui témoigna ses regrets de la détermination qu’il prit, et lui dit : « Je pensais que vous pouviez lui en rendre encore. »

D’ailleurs, ce fut alors une question politique de haute importance pour Haïti, à savoir, s’il était de l’intérêt public que chaque département fût confié au commandement particulier d’un chef militaire. On avait dû donner celui du Sud à Gérin, celui de l’Ouest à Pétion, puis à Magloire Ambroise, parce qu’il fallait concentrer la direction des choses dans les mains de ces hommes influens, après la mort de Dessalines. Mais la nouvelle guerre civile