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combattues, sinon anéanties complètement, par l’union, l’harmonie existante entre les deux pouvoirs. Mais en se divisant, ces pouvoirs allaient faciliter toutes leurs combinaisons perverses : il fallait donc, qu’entre les deux, l’un dominât l’autre, afin que la paix publique fût maintenue au profit de la liberté réelle et du bonheur du peuple. Le sénat venait de se prononcer ; c’était maintenant au Président d’Haïti à se prononcer aussi.

Le 4 août était un samedi : en apprenant la résolution du sénat, Pétion ne proféra aucune parole qui pût déceler, son intention. Comme on connaissait son caractère résolu, chacun était anxieux de la situation. Le dimanche 5 août, il se rendit, comme de coutume, sur le champ de Mars où il passa l’inspection des troupes. Revenant ensuite sur le front de la 11e demi-brigade, avec le colonel Lys, président du sénat et commandant de l’arrondissement, elles autres officiers de tous grades qui le suivaient, Pétion dégaina son sabre, fit battre un ban de promotion, et proclama le colonel Métellus, général de brigade. La 11e accueillit l’élévation de son chef à ce grade avec une joie indicible, au cri de : Vive le Président d’Haïti ! Ce cri fut répété par toutes les autres troupes, comme par une commotion électrique ; car Métellus était généralement estimé pour son courage et ses qualités civiques.

La question politique entre le Sénat et le Président d’Haïti reçut sa solution par cette décision militaire : de même qu’Alexandre, — Pétion trancha ce nœud gordien avec son sabre. Le Sénat, représenté par son président, put comprendre qu’il devait s’en tenir à la confection des lois, à l’exercice de son pouvoir législatif.[1]

  1. Le 1er février, le sénat avait adopté pour légende, ces mots : Le salut du peuple est la loi suprême. En gardant ses pouvoirs extraordinaires, Pétion en fit une application toute