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mordant dans ses propos à leur égard : de là encore la croyance qu’il fit naître, qu’il excitait le président contre eux.

De toutes ces choses naquit une sorte de jalousie contre Boyer, que les autres amis de Pétion partagèrent : de la jalousie, ils passèrent à la rivalité politique, dont Boyer lui-même traça peut-être l’exemple par l’ambition qu’il montrait. Et qui sait si d’autres rivalités, d’une nature moins apparente, nées dans les boudoirs, entre des hommes qui suivaient le torrent des mœurs de cette époque, ne contribuèrent pas à les éloigner les uns des autres dans les affaires de l’État !

De tous ceux dont nous parlons, Bonnet était celui qui était le plus opposé à Boyer : on peut dire qu’ils avaient tous deux leurs torts, car c’était entre eux une lutte d’influence, chacun visant à se poser pour l’avenir[1]. On verra cependant que Pétion ne se laissa pas influencer, et qu’il donna toute latitude à Bonnet pour administrer l’État, selon les attributions qu’il avait par la loi du 25 novembre.

Le premier acte législatif qu’il proposa au Président d’Haïti, fut un arrêté rendu par ce dernier, le 20 décembre, trois jours après l’ajournement du sénat, qui assujetties bois jaune de teinture, de gayac et de campêche, à l’impôt territorial de 3 gourdes par millier, réglé et perçu par le fisc au moment de leur exportation. Le motif de cet acte était basé ainsi :

  1. Voyez ce que dit Inginac à ce sujet, et ce qui est vrai, dans ses Mémoires de 1843. Il est certain aussi que, par sa passion dont il abusait à l’égard de Pétion, Boyer s’attirait la désapprobation de tous les hommes qui étaient dévoués au président : sachant cela, il aggravait ses torts personnels en les considérant comme ses ennemis ; même en parvenant à la présidence, il conserva des rancunes envers quelques-uns. Je ne calomnie pas, en disant des choses connues de tous les contemporains.