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niers mois de la guerre de l’indépendance, sous le règne de Dessalines et depuis, c’est que Rigaud n’était pas dans le pays, Rigaud a qui il avait eté on ne peut plus dévoué.[1]

La suppression de la charge de secrétaire d’État, sa révocation, peuvent donc avoir eu ces considérations politiques pour motifs secrets. On voit que nous ne voulons rien dissimuler à l’égard de la conduite de Pétion, même quand il y a de sa part apparence d’ambition personnelle.

Mais il faut que l’on sache aussi qu’à ce moment-là, Bonnet était en lutte avec tous les débiteurs de l’État, principalement les fermiers des biens domaniaux, presque tous officiers de tous grades. S’autorisant de son devoir de les contraindre à payer, de son rang militaire, de sa qualité de secrétaire d’État, sa fermeté ne reculait pas quand il fallait tenir un langage sévère, à eux parlant : de là les clameurs, le mécontentement qu’il suscitait. À cet égard, nous n’avançons rien dont nous ne soyons certain, et ces choses vinrent sans doute en aide à la résolution prise par le président, de lui retirer l’administration générale de la République.

Il y a eu encore un autre motif qui aura influé sur l’arrêté du 1er mai, et c’est en le connaissant, que le lecteur jugera s’il n’y eut de la part de Pétion, que des vues personnelles, qu’un étroit égoïsme d’ambition. Mais, pour apprécier ce motif, commençons par examiner et résoudre les questions suivantes :

  1. Bonnet avait beaucoup contribué à l’élection de Pétion, en opposition à Gérin ; rien ne l’empêchait de concourir maintenant à celle de Rigaud, en opposition à Pétion, lorsque d’ailleurs Lys lui-même, Daumec, Mode, Pelage Varein, etc., étaient des mécontens. Bonnet était au sénat, et il n’avait pas empêché ce corps de produire ses Remontrances ; il avait été le président du comité qui rédigea l’acte du 4 août, par lequel le sénat retira les pouvoirs extraordinaires donnés à Pétion.