Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/350

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poursuivirent leur route par la côte, et parvinrent à la hatte la Grenade. Mais ils furent contraints de gagner les bois, Romain ayant envoyé des colonnes dans toutes les directions pour leur barrer le passage.

Cernés enfin à la Plate-Forme et sommés de mettre bas les armes, manquant de nourriture, altérés par une soif ardente, sans munitions, ils promirent de ne plus fuir et sollicitèrent la permission de se reposer. Assuré de sa proie, le vainqueur, qui avait besoin aussi de repos, la leur accorda : il était nuit. Mais Toussaint et Auguste Coignac, à la faveur de la nuit, abandonnèrent leurs compagnons endormis et passèrent au milieu de leurs ennemis : déjà, les autres officiers supérieurs s’étaient détachés d’eux pour se sauver individuellement dans les bois. Au jour, Jean-Louis Vallée, seul de son grade, fit sa soumission à l’ennemi. Romain, à qui il fut envoyé avec ses gens, les fit conduire sur l’habitation Foache, où se trouvait Christophe : celui-ci fit rentrer dans les troupes du Nord, tous les anciens militaires qui avaient embrassé la cause de la République, et il ordonna de grouper en un seul détachement ceux de l’Ouest et du Sud, qu’il envoya au Cap. Une arrière-pensée de s’en servir plus tard fut la seule cause du pardon qu’il accorda à ces derniers[1].

Des patrouilles furent lancées à la poursuite de Toussaint, d’Auguste Coignac et de tous les autres officiers supérieurs qui s’étaient évadés : l’une d’elles découvrit Toussaint et Auguste endormis, on fit feu sur eux ; Au-

  1. Quelque temps après, îl distribua des grades à plusieurs d’entre eux, les fit habiller et embarquer sur sa flotte qui alla les débarquer à la pointe de la Seringue, pour se joindre à Goman. Ces militaires lui avaient promis de servir sa cause ; mais, à peine débarqués, ils se rendirent à Jérémie où ils se soumirent à la République. C’est d’eux qu’on apprit les particularités de l’évacuation héroïque du Môle.