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petit port sur le littoral des habitations Drouillard et Truitier : à son bord se trouvaient les projectiles et les autres munitions de guerre nécessaires au siège du Port-au-Prince. Il semble qu’ayant préservé les prisonniers valides, Christophe devait agir avec encore plus d’humanité envers les blessés ; mais ce monstre, qui se compara au lion dont il n’avait pas la générosité, prétendant qu’on ne pouvait en avoir soin, les fît porter sur l’habitation Drouillard, où il occupait la maison principale ; et là, dans son quartier-général, il fit dresser un immense bûcher sur lequel on jeta environ 100 blessés de Sibert. Il reput ses yeux du spectacle que leur offrirent les cris déchirans, les angoisses des malheureuses victimes de la guerre, quand le feu les dévorait[1] !

En contraignant ses soldats à cet acte barbare, il leur inspira l’idée de passer au service de la République, qui ménageait, secourait ceux qui tombaient en son pouvoir : dès ce jour, des désertions individuelles commencèrent dans leurs rangs ; elles furent comme le précurseur de la défection qui s’opéra plus tard.


Nous venons de parler de la flotte du Nord. Depuis la scission du Sud, celle de la République était désorganisée ; plusieurs de ces navives se trouvaient aux Cayes, au moment de la séparation, et y restèrent, notamment le Conquérant, le Flambeau, sous les ordres des frères Gaspard, la Présidente, etc. Au moment de son départ des Cayes, le président donna ordre de les faire venir au Port-au-Prince, avec la corvette et le brig du Nord mouillés à Miragoane depuis le combat entre les deux frégates ; mais

  1. Après le siège de Jacmel, en 1800, il avait commis de pareilles horreurs. Voyez tome 4 de cet ouvrage, page 151.