Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 8.djvu/19

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partie au Port-au-Prince et fit un second voyage où il sauva les autres. Ce simple récit ne suffit-il pas pour faire l’éloge de cet estimable noir qui s’est distingué plus tard dans des grades supérieurs, à côté du président Guerrier ?

Le fait le plus important de résistance à la barbarie de Christophe eut lieu au Mirebalais à la fin de juillet ; il entraîna la défection de tout ce bel arrondissement en faveur de la République. Le valeureux militaire qui l’accomplit a montré de si nobles sentimens en cette circonstance, que nous devons à sa mémoire de relater quelques particularités qui précédèrent cet heureux événement.

Avant le siège du Port-au-Prince, le colonel Louis Ladouceur commandait cet arrondissement et y avait commis des exactions au préjudice des habitans, et des actes de cruauté envers des militaires de la 10e demi-brigade dont Benjamin Noël était le colonel. À raison de ces faits que ce dernier n’approuvait pas, Ladouceur se voyant aussi haï que Benjamin était aimé, il l’avait dénoncé à Christophe ; mais Benjamin avait eu le bonheur de se justifier. Durant le siège, quelques soldats de la 10e, ayant déserté et s’étant rendus au Mirebalais, Ladouceur les fit fusiller sans pitié et saisit cette occasion pour vexer la famille de leur colonel, presque toute composée de personnes de couleur. Avisé de cela, alors que des désertions partielles de militaires avaient lieu chaque jour dans les rangs des assiégeans, Benjamin Noël conçut l’espoir de parvenir aussi à la défection de sa troupe en entier et de l’arrondissement du Mirebalais, lorsque Marc Servant eut effectué la sienne et eut contraint Christophe à lever le siège. Ce dernier, en prenant sa