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sous les ruines de notre patrie, plutôt que de retourner à la servitude, même la plus modifiée[1]… »


De son côté, le Roi d’Haïti, — puisque Roi il y avait, — publia le 20 novembre une Déclaration, à l’occasion de la lettre que les commissaires français avaient adressée au général Christophe. » Ce nouveau Manifeste reproduisit, comme la correspondance de Pétion avec eux, tous les faits antérieurs, notamment ceux relatifs à la mission de D. Lavaysse et de Franco de Médina ; mais son style se ressentait de la qualité de souverain que Christophe avait usurpée sur les droits des populations soumises à ses ordres : il y parlait de son peuple, à la manière des potentats. Du reste, cette Déclaration était écrite avec énergie et résolution : Christophe ne manquait ni de l’une ni de l’autre. Il n’oublia pas, selon sa coutume, d’accuser Pétion de trahison pour avoir reçu D, Lavaysse et correspondu avec lui[2]. Enfin, il dit des injures des Français

  1. Un mois après la publication des actes officiels de la négociation, le 12 décembre, Hérard Dumesle lit paraître un écrit remarquable, intitulé : « Réflexions politiques sur la mission des commissaires du Roi de France, près la République d’Haïti. » En appuyant les raisonnemens de Pétion, ses motifs, la justesse de ses vues, pour repousser les propositions des commissaires, il les développa dans un langage aussi judicieux que modéré. Justifiant les dispositions qui excluent la race blanche de la société haïtienne, il dit : « Ces articles deviennent le boulevart de notre indépendance, » après avoir prouvé le danger qui existerait dans l’admission de ces hommes, par la comparaison de ce qui se passait depuis 1802 à la Martinique et à la Guadeloupe. Cet écrit, où le patriotisme éclairé se produisait librement, faisait pressentir le futur Représentant qui devait tant influer un jour sur les esprits. Il le termina par ces mots : « Rivalisons d’efforts pour consolider le monument que nous érigeons à la postérité ; imitons ce peuple ancien qui ne trouvait jamais de bonheur loin de la patrie : qu’a ce nom sacré nos cœurs tressaillent, et laissons à nos enfans le glorieux héritage de nos vertus patriotiques. »

    Au Cap, dès le mois de mars de la même année, Vastey publiait le meilleur de ses écrits en forme de Réflexions aussi, sur une lettre d’un colon nommé Mazères, à propos des Noirs et des Blancs, etc. Mais, à l’encontre du républicanisme ardent de H. Dumesle, il y joignait toutes les platitudes d’un esprit soumis au joug d’un affreux tyran.

  2. Le 20 août, une ordonnance du Grand Henry, avait dit qu’il serait élevé, au milieu de