Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 9.djvu/12

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gouverneur résidant à Santo-Domingo ne pouvait l’interdire, lorsque ses agents eux-mêmes en profitaient.

Mais le commodore Aury et les capitaines des corsaires qui le secondaient, n’étaient pas des hommes à se contenter du trafic qu’ils faisaient. Révolutionnaires aventureux, ils soufflaient l’esprit d’indépendance parmi les chefs et les populations du Nord-Est, en leur démontrant tous les avantages que leur pays retirerait, s’il se détachait de l’Espagne, comme ses autres possessions en Amérique, en leur disant que l’heure de l’émancipation politique avait sonné pour toutes les contrées de cet hémisphère.

Ces suggestions étaient d’autant mieux accueillies, que l’esprit de tous les habitans de l’Est était encore travaillé par les idées révolutionnaires, depuis que les événemens de l’Ile de Léon, en Espagne, pendant 1820, avaient placé Ferdinand VII sous la puissance des députés de la nation, lesquels avaient rétabli la constitution proclamée en 1812 par les Cortés. Or, on sait que cet acte, en réformant les abus du régime monarchique trop absolu en Espagne, était allé au delà même de ce besoin des temps modernes, parce que le peuple espagnol avait subi l’influence des idées que l’invasion française avait répandues dans la péninsule.

Dans de telles circonstances, les grands événemens survenus dans la partie occidentale d’Haïti devaient porter leur fruit dans l’Est.

Aussi, pendant le séjour de Boyer au Cap-Haïtien, après la mort de Christophe, un habitant de Santo-Domingo, nommé José Justo de Sylva, muni d’une procuration signée de plusieurs autres, y était venu trouver le Président pour lui déclarer : que leur intention et leur désir étaient de seconder toute entreprise qu’il voudrait faire afin de