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De son côté, dès le 25 août, avant d’avoir écrit au général Boyé qu’il n’y avait pas lieu de donner suite à leur négociation, M. Esmangart adressa au Président une lettre pour lui parler de cette négociation, qui n’avait été rompue, disait-il, que parce que les bases d’un arrangement entre Haïti et la France n’étaient plus les mêmes que celles proposées en 1821 par Boyer. Cette lettre fut suivie de deux autres, du 26 octobre et du 7 novembre, où M. Esmangart revenait sur le même sujet, en insinuant que le Président avait eu tort « de charger un étranger de ses pouvoirs, lequel, par sa position, était indifférent au résultat de la négociation[1]. »

Comme il insistait pour l’envoi en France de nouveaux plénipotentiaires, c’était dire au Président qu’il devait les choisir parmi les Haïtiens.

Sa dernière lettre du 7 novembre, fut confiée à M. Laujon, qui venait alors à Haïti pour ses affaires commerciales, et à qui il en écrivit, de Saint-Lô, une autre, destinée à être montrée à Boyer, contenant de véritables instructions particulières pour le presser dans l’envoi de ses agents : lettre dont la copie fut donnée par ce négociateur-commerçant. Celui-ci n’arriva au Port-au-Prince que dans les premiers jours de janvier 1824, et déclara au Président : que la reconnaissance de l’indépendance d’Haïti par la France, dépendait de la démarche qu’il ferait, en y envoyant des agents pour en traiter avec le gouvernement français.

Nous reviendrons sur ce sujet ; en attendant, nous devons

  1. Loin d’y être indiffërent, le général J. Boyé, aux yeux du gouverneuient français, peut-être aussi à ceui de M. Esmangart, ancien colon, y prenait trop d’intérêt. On devait en vouloir à ce loyal officier français qui avait si bien servi la cause de la liberté, à Saint-Domingue, au milieu des noirs et des mulâtres dont il fut toujours estimé, et qui, en 1823, défendait si bien la cause de l’indépendance d’Haïti. On dut savoir aussi qu’il était l’anteur de la brochure publiée à Amsterdam, où il soutenait les droits de la race noire.