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possible que ce gouvernement ne prît pas une initiative à ce sujet, après les missions remplies, d’abord par le général J. Boyé, ensuite par MM. Larose et Rouanez ; missions qui élucidèrent cette question de part d’autre[1].

D’un autre côté, la résolution que la Grande-Bretagne avait prise en 1823, de reconnaître l’indépendance des colonies espagnoles de l’Amérique, devait encore influer sur la détermination de la France à l’égard d’Haïti, en la dégageant en quelque sorte elle-même de ce qu’elle devait à l’Espagne[2].

Et s’il est vrai, comme on l’a cru, que le gouvernement britannique aura engagé celui de la France à en finir avec son ancienne colonie, qui était en négociations avec lui depuis dix années, parce qu’il serait disposé à agir envers elle comme envers les colonies espagnoles, le gouvernement français ne pouvait plus ajourner l’acte auquel il s’était d’ailleurs préparé.

Il a été dit aussi, que M. de Villèle, ministre des finances et président du conseil, voulait tracer un exemple que l’Espagne aurait pu suivre par rapport à ses colonies émancipées, dans l’espoir que cette puissance eût pu se libérer alors de la dette énorme qu’elle avait contractée envers la France, par suite de l’intervention de celle-ci qui, en 1823, avait replacé Ferdinand VII dans la plénitude de son pouvoir absolu.

  1. Lorsque le Télégraphe du 17 octobre 1824 parvint en France, contenant la lettre du cardinal Jules de Somaglio, pro-préfet de la Propagande, adressée « au Président de la République d’Haïti, » plusieurs journaux de Paris, même du parti religieux, firent la remarque que, le Saint-Père ayant ainsi reconnu l’existence politique d’Haïti, il était instant que le gouvernement français prit une résolution semblable.
  2. Le 3 octobre 1824, un traité de paix, d’amitié, de commerce et de navigation fut signé à Bogota, entre les Républiques de Colombie et des États-Unis. Ainsi, la France, qui hésitait jusqu’alors envers Haïti, par rapport aux colonies espagnoles, n’avait plus de motifs sérieux.