Page:Aristophane, trad. Talbot, 1897, tome 1.djvu/343

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SECOND ESCLAVE.

Moi, je vais expliquer le sujet aux enfants, aux jeunes gens, aux hommes faits, aux vieillards et à tous ceux qui se croient quelque supériorité. Mon maître a une étrange folie, non pas la votre, mais une folie nouvelle tout à fait. Le jour entier, les yeux au ciel et la bouche béante, il invective contre Zeus : « Ô Zeus ! dit-il, que veux-tu donc faire ? Dépose ton balai ; ne balaie pas la Hellas. »

TRYGÆOS, hors de la scène.

Ea ! Ea !

SECOND ESCLAVE.

Silence ! Je crois entendre sa voix.

TRYGÆOS.

Ô Zeus ! que veux-tu donc faire de notre peuple ? Tu ne t’aperçois pas que tu égraines nos villes !

SECOND ESCLAVE.

Voilà précisément la maladie dont je vous parlais : vous entendez un échantillon de ses manies. Mais les propos qu’il tenait au début de son accès de bile, vous allez les apprendre. Il se disait, ici, à lui-même : « Comment pourrais-je aller tout droit chez Zeus ? » Puis, fabriquant de petites échelles, il y grimpait du côté du ciel, jusqu’au moment où il se cassa la tête en dégringolant. Mais hier, étant malheureusement sorti je ne sais où, il a ramené un escarbot, gros comme l’Ætna, et m’a forcé d’en être le palefrenier ; puis, lui-même, le caressant comme un poulain : « Mon petit Pègasos, dit-il, généreux volatile, puisses-tu, dans ton essor, me conduire droit chez Zeus ! »