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cher fortune. On voit successivement un poète, un devin, un arpenteur, un inspecteur des villes tributaires, un fabricant de décrets. C’est une occasion pour Aristophane de donner un libre cours à sa verve satirique et à sa malice. Tous sont chassés honteusement et le sacrifice d’inauguration s’achève. Les oiseaux chantent alors leur puissance et leur félicité. Les dieux, qui ne reçoivent plus la fumée des sacrifices, donnent à leur messagère Iris mission d’aller se plaindre aux hommes, mais elle ne peut franchir la ville nouvelle. De leur côté les hommes envoient à Pisthétérus une couronne d’or et accourent auprès de lui pour se faire naturaliser oiseaux et recevoir des ailes. C’est un jeune homme qui attend impatiemment la mort de son père, puis Cinésias, un poète dithyrambique, puis un sycophante. Cependant les dieux affamés sont réduits à capituler et à députer à Néphélococcygie trois ambassadeurs. Hercule, Neptune et un dieu Triballe. Après bien des pourparlers le traité est signé : Jupiter rendra le sceptre aux oiseaux et Pisthétérus recevra Souveraineté en mariage. La pièce finit par le festin de ces noces.

Les Oiseaux furent joués en 414 avant Jésus-Christ, pendant que se faisait l’expédition de Sicile. Ils obtinrent le second prix ; le premier fut donné aux Buveurs d’Amipsias. On s’est étonné de trouver dans la pièce d’Aristophane si peu d’allusions aux graves événements qui se passaient alors. Alcibiade avait été rappelé ; le siège de Syracuse traînait en longueur et on commençait à prévoir une funeste issue pour cette expédition qui avait été décrétée avec tant d’allégresse. Il est à supposer que le poète, dont les conseils n’avaient pas été écoutés précédemment, respectait les sentiments de désillusion qui s’étaient emparés de ses concitoyens et qu’il cherchait, par cette pièce toute fantastique, beaucoup plus à les distraire qu’à leur rappeler les fautes qu’ils avaient commises.

Cette pièce, dit M. Deschanel, est vraiment unique dans son genre. Shakespeare n’a rien de plus léger, de plus frais, ni de plus brillant, dans le Songe d’une nuit d’été, ni Calderon dans les Matinées d’avril et de mai, ni Calidâsa dans Sacountâla.

L’éminent critique rappelle aussi quelques-uns de nos écri-