Page:Aristophane - Théâtre 1889 tome 2.djvu/376

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tiel de ne laisser apercevoir aux spectateurs aucune partie de notre corps ; ce serait vraiment joli et pair trop risible si, au milieu d'un peuple nombreux, quelqu'une d'entre nous, sautant sur les banquettes, laissait tomber son manteau et allait ouvrir sa robe et se faire voir toute nue. Si, au contraire, nous nous asseyons les premières, et si nous nous ramassons dans nos vêtements, nous resterons inconnues, et, quand nous aurons déployé ces barbes, que nous attacherons ici à nos mentons, qui, en nous voyant, ne nous prendra pas pour des hommes ? Agyrrhius n'a-t-il pas gardé l'incognito à l'aide de la barbe de Pronomus[1] ? D'abord ce n'était cependant qu'une femme, et aujourd'hui, vous le voyez, il occupe les premières dignités de la république. Allons donc, au nom du ciel, ayons le courage d'essayer si nous n'aurions pas quelque moyen de nous charger de l'administration de la république, pour lui être utiles en quelque chose. Car, à présent, rien ne va ni à voiles ni à rames.

Septième femme

Mais, au moins, dites-moi, comment aura-t-on des harangueuses dans une assemblée de femmes ?

Praxagora

Rien n'est plus facile. On observe communément que les jeunes gens qui se prêtent le plus volontiers aux goûts pervers des autres[2], sont de très beaux parleurs ; or, grâce à la bonne fortune, cette habitude ne nous manque pas.

  1. Agyrrhius était un général ; il était de mœurs dépravées. Pronomus était un musicien qui avait une fort belle barbe.
  2. Qui plurimum subiguntur.